samedi 6 février 2021

Les jeunes attirés par la droite, parce qu'ils rejettent le wokisme, le correctivisme politique et le pharisianisme

Bill Maher est un journaliste américain très marqué à gauche. Il anime depuis 2003 l’émission politique Real Time with Bill Maher diffusée chaque semaine sur la chaîne de télévision HBO. Il est connu pour ses prises de position polémiques, progressistes et violemment conformistes dans son athéisme militant. Nous présentons ci-dessous un extrait de son émission où il aborde la question de 44 écoles débaptisées à San Francisco. Un tiers de toutes les écoles publiques. (Voir Passé historique blanc : San Francisco débaptise 44 écoles.)

Lors de l’émission de vendredi de « Real Time » sur HBO, l’animateur Bill Maher a réagi (voir vidéo en anglais ci-dessous) : « [Rebaptiser ces écoles] n’améliore la vie de personne. Faire disparaître le nom d’une personne parce qu’elle n’a pas remplacé en 1984 le bon drapeau est de l’affichage de vertu, du pharisianisme. Je ne dis pas que ce n’est pas un problème important, je dis que lorsque vous ne parvenez pas à éteindre les incendies [en Californie] ni à construire des maisons, vous donnez l’impression de ne passer votre temps qu’à cela. Une grande partie du pays se dit que ce qui obsède la gauche, ce n’est pas le progrès réel, mais ce non-sens. »

Un invité, Matt Welch, rappelle que « 50 000 élèves [des écoles publiques] de San Francisco n’ont pas mis un pied dans une école depuis 329 jours. C’est épouvantable. Comme district scolaire, ils ont essentiellement une tâche : instruire les enfants. Ils ne font pas ce travail. [Les syndicats d’enseignants et l’administration refusent.] Et qui souffre de cette absence d’instruction ? Les enfants issus de milieux défavorisés et des minorités ethniques. Et plutôt que de consacrer tout leur temps et tout l’argent dans ce seul but […] ils s’adonnent à ce pharisianisme de mauvais aloi à l’aide de Wikipédia » pour trouver des péchés aux gens qui ont donné leur nom à des écoles, comme Paul Revere ou Abraham Lincoln.

Une autre invitée, Charlotte Atler, ajoute qu’une des seules choses qui fait que les jeunes sont attirés par la droite, c’est leur rejet de ce correctivisme politique, ce pharisianisme, de cet affichage vertueux. Ce n’est pas parce qu’ils ne croient pas dans le changement climatique, ce n’est pas à cause des impôts, ajoute-t-elle. Ces affirmations sont confortées par des sondages, voir Pourquoi la culture, et non l’économie, détermine la politique américaine et États-Unis — Le vote républicain caché : les diplômés opposés au politiquement correct.

Matt Welch mentionne ensuite le fait qu’un journaliste du New York Times vient d’être renvoyé parce qu’il avait employé le « mot en N. », non pas comme une insulte, mais dans un article consacré au langage raciste. Il s’agit d’un vétéran du NYT, il a fait son autocritique devant les membres de la cellule du parti, pardon de la rédaction. Lire plus de détails ici.

Matt Welch rappelle la théorie de la « zéro tolérance ». La droite considère ce genre de licenciement à la moindre erreur de la folie, associe le New York Times et la gauche à cette folie. Pour M. Welch, il s’agit d’un message séduisant.

Pour Bill Maher, il s’agit d’un trouble générationnel. « Qu’est-ce qui se passe avec les millénariaux [génération Y] ? On dirait que rien n’est assez bon pour eux. Lincoln n’est pas assez bon pour vous ? Mais [juron] pourquoi ? D’où cela vient-il ? » 

Charlotte Atler a quelques hypothèses. Par exemple, la tolérance zéro, le « une faute et tu sors ». On retrouve cela dans la manière dont les millénariaux ont été élevés, dans les années 80 et 90. C’est à cette époque qu’on a commencé à parler d’intimidation à l’école et qu’on y instaura la tolérance zéro. Si un écolier de 9 ans se battait à la récré, poussait quelqu’un de la balançoire ou traitait un autre écolier de tous les noms, il pouvait être renvoyé après cette unique faute. Cette idée qu’il faut imposer une punition draconienne à ce qui semble être une incartade aurait été imposée par les baby-boomeurs parce qu’ils craignaient que leur précieuse progéniture pût vivre quelque moment désagréable.

Jonathan Haidt et Gregg Lukianoff dans The Coddling of the American Mind attribuent cette paranoïa notamment au fait que les médias ont commencé à parler nettement plus souvent d’enlèvements d’enfants dans les années 80. En 1982, les cartons de lait ont commencé à arborer les portraits d’enfants disparus. En conséquence, pour Haidt et Lukianoff, de nombreux parents ont décidé de restreindre la liberté de leurs enfants, à tenir les rênes plus serrées et sont devenus plus anxieux par rapport à la sécurité de leur descendance. Pour ce carnet, on néglige aussi trop souvent, la contraction démographique qui a commencé à se faire ressentir dans les années 80 et 90 : les enfants devenaient rares et d’autant plus précieux, car rien ne prouve que les enfants aient commencé à disparaître en plus grand nombre dans les années 80.


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